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LA LOGIQUE INTERNE DU RAID MULTISPORT
Le raid est une discipline d’endurance aérobie qui a comme objet un projet de déplacement dans le milieu naturel en enchaînant différentes activités dont les principales sont le trail, le VTT, le kayak et l’orientation. Le raid n’a pas de format type, les enchaînements sont dictés par le territoire traversé et le format laisse place à la créativité des organisateurs. La variété des parcours, aussi bien au niveau technique que physique, permet de pratiquer le raid quel que soit son niveau.
Pratiqué en équipe allant de 2 à 4 équipiers (équipes mixte, féminine ou masculine), le raid fait appel à de nombreuses compétences physiques, techniques, tactiques mais également comportementales, avec de fortes valeurs éducatives : la polyvalence, l’autonomie, le dépassement de soi, la stratégie, la cohésion, l’entraide, l’esprit d’équipe etc.
Le raid peut se définir comme une aventure : aventure physique, aventure humaine et aventure sportive dans un milieu parfois hostile et reculé, mettant en avant la beauté des paysages.
1. LES DIFFÉRENTS RAPPORTS
1.1. Le rapport au corps
L’activité physique met le corps en mouvement, entraînant une multitude d’actions et phénomènes : activation cardio-respiratoire, musculaire, etc. Le fait de pouvoir les ressentir, même s’ils ne sont pas visibles s’appelle la proprioception ou encore interoception. La proprioception permet, lorsqu’elle est développée, de mieux connaître son corps et d’agir de manière appropriée. Ce rapport est intéressant au niveau éducatif puisqu’il permet une meilleure connaissance de soi et de ses facultés physiques.
La multitude d’activités et de supports (kayak, VTT, etc) demande une polyvalence et différentes motricités que le pratiquant devra appréhender et s’approprier.
Le milieu naturel dans lequel évolue le raideur demande un engagement physique mais également affectif. La notion de risque est une composante de l’activité. La connaissance de soi est fondamentale pour s’engager en toute sécurité : analyser les conditions, ses compétences, gérer sa sécurité pour garder son intégrité. Le rapport au corps n’est donc pas limité au physique mais intègre aussi son état émotionnel : se connaître et gérer ses émotions.
1.2. Le rapport au temps
L’activité physique met le corps en mouvement, entraînant une multitude d’actions et phénomènes : activation cardio-Le Le rapport au temps est omniprésent dans un raid car l’équipe vainqueur sera celle qui aura validé toutes (ou le plus) de balises et qui arrivera dans le meilleur temps. Le temps de course final n’est pas la seule composante : des contraintes temporelles peuvent aussi exister au sein même de la course, selon son format. On retrouve parfois des sections en temps limite (exemple : course d’orientation en temps limite*,), mais aussi la présence de barrières horaires ou shunt** voire de dark zone***. La gestion du chronomètre induit de vraies stratégies de course.
*temps limite au cours duquel il faut valider le plus grand nombre de balises. Si le temps est dépassé, des pénalités de temps majorées peuvent s’ajouter.
**barrière horaire: heure limite qui ne permet pas d’aller sur la section suivante. Soit la course est finie pour l’équipe, soit l’équipe est dirigée (shunt) sur un plus petit parcours (section suivante, balises neutralisées ou suppression de certaines sections).
***interdiction de progresser de nuit sur certaines sections.
1.3. Le rapport à l’espace
Le raid rassemble différentes disciplines qui se pratiquent toutes en pleine nature, sur des milieux variés, variants et multiples (terre, eau, souterrain).
Le pratiquant doit constamment prélever de l’information, supputer et prendre une décision en conséquence. Il scrute le milieu qui l’entoure, recherche les indices pertinents, et fait appel à un décodage perpétuel sensori-moteur. Les prises d’informations et de décisions sont constantes. Les actions sont peu reproductibles (environnement changeant). Cette incertitude nécessite des qualités d’adaptation mais aussi de maîtrise émotionnelle.
Par la dimension d’orientation, mais aussi de choix de cheminement (exemple : choix d’une ligne en rivière) ce rapport à l’espace est très marqué : il s’agit de décoder l’espace par la prise d’information, de comprendre l’espace présent. En orientation ou navigation, il faudra ensuite mettre en relation la carte et le terrain, et passer ainsi d’un environnement inconnu à un environnement familier, permettant de prendre des décisions d’itinéraires en fonction de la réalité du terrain.
Ce rapport à l’espace, à sa découverte et le choix du cheminement à travers celui-ci font partie de l’ADN du raid : peu d’épreuves de raid utilisent les mêmes parcours d’une édition à l’autre. Les cartes sont tenues secrètes jusqu’au départ. A chaque course, il s’agit de découvrir, d’explorer, et d’appréhender un espace de pratique.
Bien sûr, “aller vers l’inconnu” se fait de manière progressive et nécessite un apprentissage, en augmentant progressivement le degré d’incertitude : le passage d’un milieu fermé à un milieu ouvert, d’un milieu connu vers un milieu inconnu. La pratique en équipe est une composante permettant de garantir une certaine sécurité des pratiquants (évolution à plusieurs, coéquipiers disposant de compétences complémentaires).
1.4. Le rapport au matériel
Chaque activité qui compose le raid nécessite du matériel spécifique, pouvant varier d’une épreuve à l’autre. Les parcours de raid n’étant pas standardisés, l’analyse du parcours (enchaînement et distance) permet de programmer les transitions et le matériel nécessaire (une liste de matériel obligatoire minimum par activité est fournie par l’organisateur). En toute autonomie, et sur des parcours parfois très longs (plusieurs jours), les raideurs devront faire des choix quant au matériel à prendre, toujours avec un souci de meilleur compromis entre sécurité/confort (vestimentaire, ravitaillement, etc) et légèreté. Cette autonomie s’apprend pour pouvoir anticiper, choisir, et utiliser efficacement le matériel et pour gérer les transitions.
1.5. Le rapport aux autres
Le rapport aux autres en raid multisport, est complexe et double :
– le rapport avec son/ses coéquipiers
– le rapport à l’adversaire
1.5.1. Le rapport avec son/ses coéquipiers
Nous avons abordé plus haut la connaissance de soi. En raid, elle est nécessaire mais pas suffisante. Le raid se pratique en équipe. Le MOI devient un NOUS, le rapport au corps est donc multifactoriel, car c’est bien le NOUS qui évolue. La connaissance de soi se prolonge par la connaissance de NOUS : pour que l’équipe ne fasse qu’un, les engagements physique et affectif doivent être établis en fonction du NOUS et pas du seulement du MOI. Je suis conscient de mes compétences, de mon corps, de mes possibilités, de mon état de forme, mais je dois également prendre en compte ceux de mes coéquipiers. Je sais que ce (ces) coéquipiers a (ont) les compétences et les ressources nécessaires pour mener le projet de l’équipe. Je connais également sa façon de fonctionner, ses besoins. Des choix stratégiques (vitesse de progression, itinéraire, entraide) devront être pris en conséquence.
La composante équipe complémentaire et soudée est une clé de la performance. La connaissance de soi mais aussi de ses coéquipiers est fondamentale et la communication (verbale et non verbale) prend également toute son importance (avant, pendant voire après l’épreuve). Le raid faisant appel à de multiples compétences, il faut savoir endosser (et respecter) un rôle au sein de l’équipe et le tenir : les compétences des uns seront mises au service des autres pour que l’équipe soit plus efficiente.
1.5.2. Le rapport à l’adversaire
Le rapport à l’adversaire est stratégique : utiliser les points forts de l’équipe, faire ses choix d’orientation sans se faire influencer par les autres nécessitent une bonne confiance en soi et en son collectif. Parfois, l’équipe peut se retrouver seule, sans adversaire à proximité pendant une durée plus ou moins longue. Il faut alors maintenir sa course, ses choix, son rythme, sans pour autant avoir de repère extérieur. D’autres fois les équipes sont au coude à coude, il faut donc rester dans sa course, notamment en orientation, sans se faire perturber par le choix des autres équipes.
Il est difficile de connaître son classement avant les résultats finaux : une équipe ayant réalisé le meilleur temps n’a peut-être pas pointé toutes les balises.
Vous l’aurez compris, le rapport aux autres en tant qu’adversaire peut être très différent d’une course à l’autre. A l’inverse, le rapport à son/ses coéquipiers reste l’une des composantes principales de la réussite. Plus l’équipe est nombreuse (nombre d’équipiers) et plus le raid est long (fatigue qui s’installe), plus le collectif prend de l’importance (objectif partagé, rôle, compétences complémentaires).
Le milieu d’évolution est parfois isolé et hostile. Cette caractéristique des sports de nature met en avant les dimensions d’entraide forte et de solidarité (y compris entre équipes), qui resteront toujours la priorité en cas d’urgence. Il n’est pas rare de voir des équipes prendre du temps de course, ou mettre leur course au second plan pour porter assistance si besoin.
2. LES RESSOURCES
L’analyse du raid permet de montrer la richesse de ce sport et de mettre en avant le type de ressources sollicitées. Les ressources sont les moyens dont dispose un individu pour accomplir une tâche et agir avec efficacité.
Le niveau de sollicitation de ces ressources dépend du degré d’expertise de l’athlète. C’est en réponse à une tâche imposée (contrainte) que l’individu mobilise différentes ressources.
Celles-ci peuvent être d’ordre :
– Énergétiques : l’organisme répond à une sollicitation en activant les différentes filières énergétiques (anaérobie alactique*, anaérobie lactique* et aérobie*).
La réponse de l’organisme est observable notamment à travers l’augmentation de la fréquence cardiaque*, de la fréquence respiratoire* et de la ventilation.
Le raid sollicite des qualités d’endurance. La durée de l’épreuve mais également la nature du profil et des sections vont impliquer des changements de rythme conséquents (prologue, épreuve type biathlon, etc).
– Biomécaniques : chaque mouvement engage ce type de ressource en mobilisant et en agençant les différents segments du corps entre eux. Quatre processus sont à distinguer : la coordination (organisation des réponses motrices), l’équilibration (en lien avec la position du corps pendant un mouvement), la dissociation (motricité fine permettant l’indépendance segmentaire) et la latéralisation (capacité à réaliser une même action avec la partie droite et la partie gauche du corps).
La diversité des activités pratiquées mais aussi des milieux de pratique rencontrés (milieu naturel) nécessitent l’apprentissage de différentes motricités et de nombreux gestes techniques. Le milieu naturel est changeant. La capacité d’adaptation est essentielle, et la richesse des schémas moteurs permettra de faire face à de nombreuses situations (boue, cailloux, neige, eau calme/rivière, etc). Il est donc important de faire varier les exercices et surtout les conditions d’exercices.
– Informationnelles : elles sollicitent les systèmes auditif, visuel et proprioceptif. Les informations de type proprioceptif (ou kinesthésique) renseignent sur le mouvement des articulations, les tensions musculaires et l’orientation du corps dans l’espace.
Le milieu naturel apporte des incertitudes considérables. Il faut sans arrêt un décodage sensorimoteur. La prise d’information est constante et fait appel à des habiletés ouvertes : l’environnement est variable et imprévisible pendant toute la durée de l’action, demandant concentration et vigilance constantes. Ce milieu développe aussi des habiletés cognitives, via la prise de décision. La rapidité de la prise d’information et la finesse de ces perceptions influeront sur la prise de décision du choix d’itinéraire, et de la mise en place d’une réponse motrice adaptée (exemples : rapides en kayak, chemin de VTT avec racines ou obstacles, trail en terrain accidenté ou glissant). Cette prise de décision a une contrainte temporelle car elle se fait pendant l’action. Il faut être rapide et efficace, voire, dans un bon nombre de situations, il faut pouvoir anticiper ses actions.
– Affectives et relationnelles : elles regroupent les ressources émotionnelles (joie, appréhension…), motivationnelles (extrinsèques et intrinsèques) et relationnelles (présence ou non d’individus influençant l’action).
Les émotions peuvent être plus ou moins fortes en fonction du parcours et du niveau de compétences du pratiquant, de l’hostilité du milieu et de la nature des activités (cordes, eaux vives, parcours VTT techniques, etc). Elles peuvent être source de joie et de plaisir, mais aussi de stress ou d’appréhension, puisque l’individu sort fréquemment de sa zone de confort. Ce stress peut être positif ou négatif. La fatigue est aussi un facteur qui peut modifier ce type de perception. Le raid permet de ressentir de multiples émotions et demande de travailler sur la gestion de celles-ci.
La dimension collective amplifie les émotions, d’une part parce qu’on les vit et les partage ensemble, d’autre part parce que le collectif peut parvenir à nous dépasser. L’effet groupe a un effet positif : “ensemble on va plus loin”. Cependant, la composition de l’équipe a aussi son importance. Les cas sont rares, mais il peut aussi exister des “leaders” négatifs, qui pourraient entraîner l’équipe dans des émotions moins positives, voire dans des situations plus critiques.
Autonomie collective ou autonomie individuelle ?